lundi 19 septembre 2016


Donne-moi du bonheur, s’il faut que je le chante,
De quoi juste entrevoir ce que chacun en sait,
Juste de quoi rendre ma voix assez touchante,
Rien qu’un peu, presque rien, pour savoir ce que c’est.
Marie Noël, La prière du poète


          La beaufitude (que je pourrais écrire bofitude...) née d’une proximité quasi maladive avec la quotidienneté, avec ces gestes sans ampleur qui habillent nos matins paumés, quand l’ordre des choses domine, que la voix du poste nous intime l’ordre de nous éveiller à cette lointaine éphéméride-réalité… 



          La beaufitude nous habite aux lendemains des shoots justement sans lendemain, quand la drogue se retire peu à peu des tissus physiologiques en y déposant toutefois ses composants létaux, les précurseurs nous appelant à la rescousse pour que le manque rené y soit comblé… 

          Mais que suis-je et que connais-je de l’univers où se développent les remontrances, les forces de rappel, la magnitude de la drogue. Ce monde m'est aussi étranger qu'éloigné mais me communique pourtant son inquiétante étrangeté. (...)

          Si écrire est une "sale" habitude dans un monde où l’immédiateté passe de plus en plus par l’Internet médiateur (et où les pratiques de lecture ont muté par conséquent), si prendre un stylo et rédiger le reste d’incertitude internée en nos corps grimaçants n’est que le symptôme d’un mal-être, celui d'être en proie à des démons intérieurs ricanant aux encoignures, alors je suis névrosé de multiples façons. Et peut-être le sommes-nous tous également.

          Car fuir dans le véritable est (peut-être) une autre manière de nier cette éphéméride-réalité, qui n’est plus le réel, mais est plus que le réel. Parce qu'accessible et capricieuse. Parce que triviale et exceptionnelle à la fois. Parce que banale et sublime. Un peu de fange et de firmament, aurait dit le poète.

          Est-ce une façon de refuser l’écriture, une maison que plus personne n’habite au fond de soi, un "coin de ruche" (selon l'expression de la poétesse Marie Noël) désertée par les abeilles et par la joie. 

          Et aujourd'hui il me semble être un peu en avance sur mon temps d’écriture, je suis au Café des Halles Bardes et je bois tranquillement mon subside. Le morbide de la nuit s’éloigne peu à peu, je suis non pas soulagé mais rasséréné (sans réelle implémentation de la sérénité), depuis que j’ai des nouvelles de Paris et du pays de l’Euphrate.

          Peut-être est-ce tout simplement ça, le bonheur... la beaufitude transfigurée... par sa propre quotidienneté.






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