Matin blême mâtin même sortie d’autoroute puis sortie de route
Fossé et fossette faucille voie d'fausset la radio crache sa musique sirupeuse et violente dernier virage avant l’après
Je reste pantelante mon cœur mon cœur bat faiblement mon pouls
Dans le stigmate de mon poitrail il y a le trouble
Survivrai-je à la vie au vide de mes crimes
Ces erreurs pour lesquelles tu viens me chercher ces pourquoi
Je sanguinole comme une larve coupée en deux parties sur la chaussée
On me passe la camisole je ne peux plus bouger je suis enfermée
Que de paroles autour un tourbillon de tourbe je suis fourbue
Mon père m’a rappelée à la conscience je donne mon consentement
Jaillissent les herbes maculées sur le talus il y a des taches sur le basalte
Je sens comme une présence chaude contre mes joues je déglutis du rouge à lèvres liquéfié
Dans les arbres des oiseaux noirs se sont posés oseront-ils me décharner
La sirène froide me tue à petits feux je respire avec un masque à oxy-danse
Les soubresauts de la gueule rouge me font ahaner en silence
Dans les rues j’entends le sifflet le hurlement du laissez-passer
Quelque part non loin quelqu’un pense un jour moi aussi j’y serai
Dans l’ambulance
Les gens ont couru lentement autour de moi ils ont des gestes saccadés émasculés
J’ai posé mon regard au moins vitreux sur le sourire d’un médecin
Elle est jolie a-t-il pensé
Je reste en vie je reste en vie envie
J’attends j’attends on prélève un peu plus de sang
Je serre les miennes contre ma poitrine je sens l’étau
Ma mère s’affole elle s’évanouit dans le lointain je reste seule
Au milieu d’une foule immaculée
Dans la voiture mon enfant Je demande à le voir je le crois disparu
On m’affirme que non je pleure encore jamais on ne m’aura autant menti
Me dis-je et je supplie encore pour le voir ici maintenant
Les hommes ont un air d’ennui j’ai compris je m’effondre
On m’affirme que je le verrai après mais après quoi je veux le voir je veux le voir
le serrer contre moi lui redonner mon souffle
Les allées sont montées par des gens en armes
Les couloirs de l’après vie s’ouvrent devant mon âme
Maria-Helena VIEIRA DA SILVA, Intérieur rouge, 1951 (détail, renversé) |
Je ne crois pas à l’après vie me voici dans une salle éclairée
Par une lampe étrange qui rappelle le stroboscope des boîtes
De nuit
Dans le souci de bien faire je me suis endormie
Soulagée d’un enfer et pardonnée depuis
Par les médicalmants
Un jour ou l’autre il faudra je crois
Qu’il y ait la pluie
sur les taches rouges de la nuit© Michel Marchand, tous droits réservés