samedi 12 septembre 2015

Diastole et pistole...

Écrire une page chaque jour, laisser vagabonder son imagination de ligne en ligne avec la légèreté d'un papillon diurne ou même crépusculaire, se laisser bercer par les mots, leur sonorité, leur redondance familière, aller comme ça au gré du courant, dans un état de torpeur où la douceur le dispute à la langueur, où s'accrochent les frondaisons qui descendent presque jusqu'à l'onde, qui font des pleurs cristallisés sur la surface des eaux dansantes. Je pense à riveter le monde dans un tunnel de verdure, je n'ai qu'un vague-à-l'âme : (...) je soupire lentement, dans une respiration de sommeil sans rêves, je respire et toutes mes inspirations sont faites pour ce coupant soupir, ce dirimant navire intérieur qui fait la vérité des ombres et la moiteur des tempes...

Il y a un mystère, une sorte de mystère, qui tait, qui ouvre, qui ferme à son gré les sépales de l'âme, c'est la douce diastole de la vie même, je veux dire la vie de l'esprit, le vide sanitaire de nos enfantements idéels, qui n'est sans doute pas l'inconscient.

A travers le temps, comme malgré lui, nous nous regardons comme des permanents sur cette humble planète, comme des tableaux vivants accrochés au pan d'un mur blanchi à la chaux. Nous nous croyons donc importants, puisque nous avons le droit de vie et de mort sur nos désirs (dans la mesure de notre maîtrise de soi, notion qui est plus noble que celle de self-control) et que nous avons une pensée d'éternité, une notion de survie, dans la surpuissance de notre affect fondamental. Il fait chaud, mais nous ventilons, nous climatisons notre vie avec des protubérances de synthèse, des prolongements de nous-mêmes, des prothèses de toutes sortes. Sorcellerie que tout cela aurait dit notre aïeul idéal, que nous percevons comme l'apparition de la figure de l'aède, notre prédécesseur sur l'hémisphère de nos consciences.
Oui, figure d'idylle mentale, schématise nos vérités, enclenche nos allures modernes, embraie sur la grand-route de nos vides cachés. Oui, impossible mentor, fais de nous les marionnettes que nous sommes, ou que nous fûmes, délivre-nous du mal de vivre, des bleus à l'âme, des ulcères purulents. Oui, ancêtre sans une tache, lave-nous de nos billevesées, délivre-nous encore une fois de l'ombre grandissante sur notre chemin, qui appelle les premiers coléoptères nocturnes, les sphingidés aux formes inconnues et les chauves-souris suceuses de sang.

Empare-toi de nos récits, fais-nous vibrer aux tiens pareils.



Nous nous sauverons de l'imbécile grandeur de nos déboires, comme des rats quittant le navire aux soleils couchants. Erreur : nous ornons nos vides de mille erreurs infatuées. 
Noble aède, proue de notre foi, dirige-nous vers le port de notre plaisir.

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