samedi 17 octobre 2015

L'abattoir d'Alès

Un autre drame se joue des orties brûlantes de mes joues
                            je rougis comme un malade
         le sang jaune de mes ictères

si tu veux nous irons                                                            où j’ai vu enterrer grand-mère
du côté des bouges immobiles,                                     sirupeux souvenir de nos années manquées
là où sirotent les blafards les blêmes et les                            éthérés de service
dans le creux des arbres morts,                                 où s’installent les écureuils en proie à leurs fausses couches

un drame immense qui ne fait rien que de cesser de s’écrire pour la fin des vœux et des aveux
                un carrousel affreux de lueurs sans pareilles de foutaises et de tourne-poubelles

le fouilleux interstice de nos velléités fait tomber l’archifesse de nos grands camaïeux sur les épaules avachies

de l'archimandrite d'Eurasie

demain au rôti variqueux               et après 
l’alibi    le paltoquet de nos chansons, 
                 le bibelot cru de nos soupières de nos          grimoires de magistères
        nous irons là pensifs et bas embouteillés                        de fausse joie comme portés sur les échasses de guingois 
                          qui nous servent de guides dans le maquis de nos soupirs

je mugis comme un lion de Belfort
silencieux et... mort

les humbles connaissent les transferts de public en public
jusqu’au dernier port

un autre râle pour terminer ce bout de rien un déclic pour la dernière pose
ce matin, je panse mes plaies avec du sainfoin

Les images de l'abattoir me laissent glacé et rougissant
l'insoutenable                                     à bout portant

(Les enfants manifestent à côté du Concordat,
et je pense qu’ils ont raison de vouloir vivre
et de crier la vie, la vie, la vraie (!)

avant qu'il ne soit trop tard)

comme un train de la mort
passe sur un pont

et s'éloigne 
tranquillement

septembre 2007- octobre 2015
Photos : musée Miniature et Cinéma, Lyon prises en 2013

vendredi 16 octobre 2015

Poste Restante

comme une lettre à la Poste restante
comme un ciseau défait de sa paire
comme un rond de serviette sans son linge
comme un oiseau sans pattes condamné à voler 
jusqu'à l'épuisement

comme un sourire tronqué 
et comme le ventre de la ville morte

comme un orang-outang aux pattes palmées

Musée Miniature et Cinéma, Lyon
koala et paresseux

coryphée d’insoumission
étrave sans eau
phare sans feu

comme un oublié de l’histoire
un substitut du remplaçant

l’Observateur du Rivage des Syrtes

le prévaricateur de la non-science
l’orage bleu et la terre inféconde

cette instance de débilité folle mais vraie

je voudrais ne plus être diarrhéique 

je voudrais folle mais vraie envie retenir le temps passé
me retrouver dans le présent
Image décomposée du match de la vie...


au lieu d’attendre un avenir cadenassé
un avenir d’épave au fond des océans trop pacifiques


je voudrais aimer.



Entre les ambres et les ors

Musée Miniature et Cinéma - Lyon, 2013

Entre les ambres et les ors

Lumière tamisée sur le chemin de vie,
Un soupçon d'éternel compose son bouquet,
Éclatant silence qui mobilise nos cœurs,
Comme un regret informulé aux douceurs exquises,
Nous sommes les passagers d'un aéronef aux couleurs de la nuit
Nous sommes des étrangers dans un système transi
Nos amarres sont ailleurs, elles sont au paradis
Où le poète a dit qu'il irait avec les ânes
Avec les humbles et les petits

Nous sommes au fond d'un tableau, et dans le clair-obscur
Nous tentons de faire briller nos lampes de masures
Inconstance de la vie, brouillards encapsulés
Notre voie est tracée
Et notre galaxie
Lactée pour l'infini
Brille de mille et un feux de Bengale
Entre les ambres et les gris or
Au sein du Père et avec lui

Nos corolles ouvrent les sépales
Et laissent entrer les fragrances qui montent
Tel un encens dans le vieux temple
Tel un firmament de l'exemple
Exprimant le temps d'un sourire
Toute la mansuétude de Dieu
Musée Miniature et Cinéma, Le Parfum,
décor reconstitué
Son exacte démesure
La dormition de l'azur
Pardonnée comme un aveu

O cymbales qui retentissent
Janissaires du néant
Jusques à quand
Jusques à où
Engendrerez-vous le tourment
Cimeterres d'une armée fatale
Pour quoi l'ombre dans le regard
Pour qui l’œil sombre et le visage pâle
Fuyez loin de nos escales
Mucem, Marseille
Vous et vos yeux hagards

Nous sommes dans le coin d'un tableau
Notre présence vous semble importune
Mais nous peuplons notre infortune
De ces reflets au fil de l'eau
Sur nos tréteaux improvisés
Nous avons mis de quoi manger
Nous peuplons les instants fragiles
D'un ravissement intranquille

O cymbales qui retentissent
Épousailles du précipice
Destinées à entrer en lice
Contre la force et les délices
De la vie
Aux vertes magies

Festival de Jazz de Junas (dans le Gard) 20 juillet 2013
ambiance surréaliste pendant la montée d'un ballon musical...
O soupirs aux trompeurs accents
Dans l'attente d'un grand changement
Vous abreuvez nos solitudes
De la sève douceâtre
Des longues habitudes

Vous nous faites entrer
Dans l'art de curieux épices
Nous goûtons aux saveurs 
De la suave mélisse
Du millepertuis
Et du souci
De la voussure des cieux enflammés
Nous voici soudain infusés
Nous pénétrons les aîtres secrets
De la maison des candeurs

De la certaine et vraie grandeur
Là où puisent les beaux paysans
Dans le retour vers l'avant
Dans les étangs aux tristes splendeurs
Dans les yeux des enfants sans heurts
Au confluent de nos cœurs
Reconstruire...

Vous nous faites rêver
De plus forts nautoniers
Qui traverseraient les enfers
Pour nous guider vers la Terre

Au confluent des deux bonheurs


7 avril 2006






jeudi 8 octobre 2015

Work in progress : un jour de Fête du Travail



Elle bruine son crachin quand il fait beau et sourit sous l’orage
Je parle avec mes mots de vérités hors d’âge

Ma poésie résulte d’une mauvaise équation imaginaire/réalité
De prurits insensés et de cibles ratées
Ma poésie ne mérite pas son nom, ni ses sonorités

Elle a comme scissiparité la division cœur/esprit
Une sorte de conglomérat de nations ennemies
Un sigle et un portrait aux colères infinies

Aux couleurs tintamarres et aux sons vivipares
Comme un rejet vers le grand large
Des bateaux et des barges

Je parle mais est-ce vraiment moi qui oeuvre 
La bouche grande ouverte comme pour un cri

Et qui émets une virgule méprisable
De cœur manquant et l’âme coupable

Ridule sur la surface égale de ce plan d’eau
Comme une légère grimace sur un tableau

Mes poèmes enlacés se trémoussent et se traînent
Comme des racines investissent et se reprennent

L’une à l’autre le terreau qui gît tout au fond
Là où nul n’entre sauf à être lombric ou raton

Je perds encore ma contenance devant cet hémicycle
Mes paroles sont denses avec ces mots qui giclent

Je me mets à rimer si dangereusement
Comme un pauvre églantier sur une terre qui ment

Tous mes sauts à l’élastique se perdent
Dans les espaces cadrés de mauvaises herbes
Et je meurs chaque instant de me découvrir là
Pendant et lamentable comme un grand échalas

Je me mets à laisser mon erre m’emporter
Et alors c’est la fin de mes vertes années

Je deviens sec et dru comme un coup de bâton
Mon art lui s’ingénie à demeurer baron

C’est la fin d’une chanson jetée aux candidats
Les mots s’alignent et pleurent de leur orphelinat

Je compte les pieds comme on compterait les ronds
Mon coeur a froid soudain et c’est comme un ronron

Que de peurs subalternes sont ainsi entamées
Qui finissent de pourrir du côté du grenier

Je périple ma vie en un grand entonnoir
Finirai-je mes jours comme dans un roman noir

Le work in progress se délite lui à souhait
Débouté de l'amour et sevré de l’abstrait…

1er mai 2006/2015



mardi 6 octobre 2015

Embryon de poème

Formage de tes mains dans le cœur de mon sein
Dessin éventail, oeuvre d'une chinoise (Mme Cao) selon l'art
traditionnel chinois
Comme un radeau ivre sur la mer des montées

étonnant ce radeau médusant ce fromage

si l’art nous est conté comme un autre sévère
que Septime le septième du centenaire centime
de nos centaines d’années

(un ruineux dispendieux somptuaire concasseur)
cette lune qui répond à l’abstrait par son sourire vengeur




le sourire d’une Joconde au bord des larmes

le temporaire dégoût face aux vineuses décences

un rien dans un tout à l’égout

et ainsi le fœtus va pourrir
dans la station d’épuration

au milieu des non-sens et des alluvions de l’incontinence

comme un fétu de paille dans un grand tourbillon
entraîné dans les espaces et les allusions rhétoriques

tout un spasme de friture
de fric et de ratures

dans les derniers recoins de la prairie exfoliée

dans les ex-libris de nos retombées

le drame n’est pas là, mais dans l’arithmétique

des ex-voto

dimanche 4 octobre 2015

Nous avons été tués à Muttur

 Nous avons été tués à Muttur

menés à l’abattage comme des souriceaux un bétail de sérail
ô lumières et dérision simonie et parcimonie

nous avons été tués comme de simples moucherons nous dévoués à une cause humaine notre corps gît sans                              vie sur le parvis de votre sanctuaire

                                           périlleuse mission et pauvres missionnaires

                 dérisoire mémoire qui se rappelle à nous nous qui sommes muets du mutisme des morts des                                                    boires et des déboires rester là au milieu des combats
                           nous sommes des saints laïcs nous sommes des meules à bras

                    nous avons aiguisé l’œil perçant des aiglons et notre déchéance a fait leur triomphal cortège
                              nous sans arme et eux bardés de munitions
                                             nous en larmes et eux riant comme des curés
                leur gâchette était lâche
                                  et nous étions sans vous
                      si un blanc avait été là nous aurions pu sauver nos âmes mais voilà
                   nous sommes le sang des martyrs
                                         nous sommes virils jusque dans notre repos éternel
                   car au fond il y a la peur vrillée
                                      en nous pénétrant avant la balle qui nous transperce

                                17 sri-lankais tamouls ou musulmans pour vos talmuds
                                                 toute la rangée de vos bréviaires
                                                        guerre aux haltères que vous nous avez voulu voir porter.

                              guerre à la guerre   

dimanche 24 juin 2007


Le 4 août 2006, 17 travailleurs humanitaires d’une célèbre Ong qui oeuvre contre la faim dans le monde étaient exécutés dans la ville de Muttur située au Nord-est du Sri Lanka. Ce massacre constituait le crime le plus grave perpétré contre une organisation non gouvernementale. Trois enquêtes ont été engagées au Sri Lanka et aucune n’a abouti. Après ce qui vient de se produire en Afghanistan, je me permets de donner la voix à ces "éliminés" par erreur (???)... pour vous livrer ce petit texte. Simple dommage collatéral ?? Loin de prendre parti dans cette affaire je m'efforce de rester neutre, bien sûr, dans ce conflit. Les responsables sont toujours impunis.



samedi 3 octobre 2015

Des hymens et des hymnes



Le maximum de confort de lecture

pour un minimum d’effort de compréhension

c’est la route que j’emprunte quand je déchiffre la vie
          comme si je dribblais l’incurable

et je parle je parle comme un enfant de larme
          je descends sur ta joue
pour un départ brisant
                            après la griserie de manille

le mûrissement lent dans mes chais
          se passera de tes pourritures nobles

et je prête à chacun le crédit de mes primes
          comme si la déprime cassait la routine

et je parie certain que mon cheval gagnant
           sera comme un mistral dans la bouche de l’égout

tout se passe comme si nous avions à revendre
          les dernières pommes du vieux tremble

tu mens comme si tu pouvais respirer sans mentir
          tu me protèges derrière le roman de ma vie

la munificence de l’indécent fait des ronds de fumée
          des ondes de polluants envahissent ma pensée
et je prévarique avec tes mots comme un enfant du métro
          un Gavroche attardé
                              un horla de sémiose

rien ne sert de pâtir quand on fait dans l’abscisse
          l’ordonnée n’est pas loin
                              qui décrit nos désirs

Le pseudo-mort a parlé l’as-tu entendu
          Tous ses mots alignés font une faran-faribole

                         et je plagie ta vénusté de faïence délicate


                                   comme une tige de fleur sur l’eau opaque





mercredi 30 septembre 2015

L’angoisse de la page blanche, et rouge...

L’angoisse de la page blanche
Cymbale retentissante
Henri Dunant, créateur de la Croix-Rouge,
première ONG au niveau mondial, initiée
lors de la bataille de Solférino
Oripeau d’infini
C’est la hantise du dilettante
Qui vous écrit

Elle parle de ventre moche
De moustaches raccourcies
Et de ces vilains boches
Qui ont les paradis


(...)

Car l’art est une chanson
Qui s’arrête à l’hameçon
Et mord sans se blesser
Le vers que l’on a fait

Il festoie dans la nuit
Comme une poussière d’étoile
Qui remuerait amie
Les couleurs de tes toiles

Si zut pouvait compter
Comme un pied sans orteils
Le thé serait comblé
D’un vertueux réveil

A la fraîche et comme gris
Zigzaguant les sentiers
Battus par tant d’armées
Que le fol ennemi

A bel et bien souillés
De ses bottes tannées

Amateur de surprises
L’ennui est une lise
Qui borne mon chemin
Et me rend plus mesquin

Qu’un artiste raté
Il est un assassin
De mes vertes années
Et des baisers si vrais

Dont j'aurais tant voulu
Il change mon portrait
Dans un rire étouffé
Et me fait un poilu
La mine ébouriffée

Dessin de l'auteur,
d'après un tableau de MC Escher (?
Je ne me rappelle plus qui l'a peint...)
Dire je c’est parier
Sur un futur réel
C’est signer de plus belle
Au bas d’un beau papier

Dans l’herbeuse vallée
Où gémissent prostrés
Les soldats déboutés

Un rongement des chairs
Une gangrène au désert
C’est à Solferino
La bataille achevée

C’est à Solferino
Henri humble et discret
Que tu as condamné
L’horreur et son credo

Tous ces corps déchirés
Portaient le lourd fardeau
Des combats inégaux
Et de leurs héritiers

Là un sbire estourbi
Quelqu’un à amputer
Un enfant de la vie
Aux membres écartelés

Frontispice égueulé
Des canons mortifères
Un autre appelle sa mère
Dans son sang écrasé

Le champ est en labour
O vide et désamour
Semailles ensanglantées

Qui reviennent nous hanter

Aux esses et aux détresses
Un cadavre accroché
Fait mine de paresse
Quand il est remué

Un vent fait la promesse
Détestable caresse
Des échangeurs de paix
Contre cet art abstrait

Les travailleurs poètes
N’ont que faire de vos fêtes
Armistices écuelles
Aux souffreteux cruels

Dans l’étouffoir farouche
La croix vermillonnée
Épouvantail aimé
Vient apposer sa bouche

Sur les abandonnés

vendredi 25 septembre 2015

Cariatide



"I will return the cities my father took from your father, Ben-Hadad offered."You may set up your own market areas in Damascus, as my father did in Samaria."
Ahab said, "On the basis of a treaty I will set you free."1 Kings 20:34 - NIV





Cariatide
Callipyge éternelle nuages de l'oubli
Comme une cicadelle sur ma main refermée

Comme un roseau panserait les jours d’assuétude
Les sourires dépensés et des cadenas ouverts

                      (Une telle dépense onc ne dessert)

Œuvre de l'artiste chinoise Wang Xiao Yan (WXY) peinture sur bois 2015
Je puise dans le cœur de l’insoupçon
Et je ridule le feu de mon art supplanté

Mon arme est la patience, qui s’énerve tranquille
Sur les rues enfermées, dans le dos des études

Sur les sentiers croisés qui indiquent la mort
                         Qui s’enfoncent dans le temps avec la force molle

De ceux qui savent la fin proche qui sont découragés
                          Et qui croient qu’un instant peut les reformuler

Dans la honte des années perdues
A rechercher à farfouiller à se départir de ses tripatouillages

Comme si

                                  Et aussi le prétoire où parlent les femmes au dos des keufs
Là où se jouent les libertés conditionnelles
                                  Les serpes qui retombent au cou des prisonniers

Tous les souvenirs hantant les tourelles de l’ennui

Oiseaux noirs et glauques dans le courant des nuits passées

Passées à espérer à échafauder des théories
                                                                         à déambuler lugubres
Dans la cellule noircie par tant de cigarettes

Dans le formidable tir des poubelles qui tombent
                                             Au fond du camion qui emmène les cadavres

                 Et défait nos lits au carré

Comme si

Et puis les formidables matraques qui s’abattent sur la tête
Les coups de poings les serre-dents et les autres péris

Tout un camouflage d’alibis
                                une série printemps gris

Tant que

Les tanks ne seront pas surpris dans la ville
                     Que les roquettes tomberont comme des pluies de puits

            Pour une archéologie de la haine
Toute une série de sirènes sans bruit
                   Qui défilent porteuses de la morgue des thrènes

Des anciennes chansons pour boire l’insomnie

                                                                     Et la non-vie.

                                  Dans l’arbre mort j’aimerais trouver un coin de miel
                                 Mais il n’y a que de vieux papiers gras et des bouteilles

                Des canettes de bière et du soda évaporé



Comme lui.





mercredi 23 septembre 2015

Objection, votre Honneur !

- Pourquoi es-tu distrait : qu'est-ce qui ne va pas ?
- Laisse-moi tranquille, ne t'occupe pas de moi !

- Mais tu es d'une humeur massacrante, pourquoi  ?
Je ne t'ai rien fait, j'espère, allez, dis-le moi !
Dessin de Plantu, dans le journal Le Monde,
pour les XXVIIIes rencontres de Pétrarque, 2013

- Comment ne serais-je pas inquiet quand mon frère souffre
Comment me savoir libre et lui au fond d'un gouffre

Mon frère est emprisonné, il est bâillonné
On ne le comprend pas, on le vêt d'un droguet

Il souffre pour ne jamais faire souffrir quiconque
Il attend sa sentence comme un coup de gong

Il prie chaque jour, chaque nuit
Le monde entier est devant lui
Je sais qu'il n'a pas d'ennemi

Il donne sa liberté pour ne pas laisser perdre
Leur raison de vivre aux ennemis de l'Hydre

Étau autour de lui les barreaux se resserrent
Les murs dérobent la lueur bleue de l'éther

Il étudie la moindre parcelle de la Loi,
Fait du cachot un temple à son Dieu Jéhovah

Rien ne le trouble comme la rumeur des bottes
Le bruit noir des canons et la charge des chars

Il ne peut en conscience œuvrer pour nulle guerre
Son nom est inconnu mais sa chandelle est fière

Dehors la vie remue telle un fleuve impassible
Les enfants sont joyeux et tirent sur des cibles

Les chiens jappent gaiement ou pour une menace
- Inaudible à leurs maîtres - au centre de la place

- Pourquoi es-tu inquiet pour un soldat de moins
- Eh ! T'a-t-il nui l'ami de quelconque manière

Son droit est de dire non au bruit des cartouchières
Son silence est un long et douloureux témoin

Comme si demain un grand conflit mortifère
Allait ensanglanter son pays attaqué

- Son amour pour ses frères va-t-il donc l'emporter
- Si déjà il acceptait d'apprendre la guerre

- Gott mit uns ! disaient les nazis à la Seconde
Lui se tait et remet ses pensées dans son cœur

(Mais on frappe à sa porte : objecteur c'est ton heure
Voici venu du temps des juges la faconde

De refus d'obéissance il te faudra répondre
Tu moisiras des années dans ce cachot sombre

Vrai prisonnier de l'espérance
Porte le seul flambeau qui danse

Pulsion de vie pulsion d'amour
Contrecarrent encor plus fort
La pulsion de mort...)




mardi 22 septembre 2015

Champs Élysées, statue de De Gaulle

25 septembre 2006




Les riverains du fleuve sont privilégiés par leur proximité avec le bonheur, ou plutôt avec la douleur d'être heureux, ce qui n'est pas exactement le bonheur même. En fait. Tempus fugit et les ardoises à régler sont aussi vraies que les marrons qui dégringolaient tout à l'heure dans cet espace vert où logent les passants, fleurant bon le cyprès (et aussi le sapin). Nous sommes cernés par la ville, écartelés entre passé et futur, à la merci des vents contraires qui font ployer le navire et menacent notre traversée. Ce n'est pas bien d'écrire quand on n'a rien à dire. Mieux vaut arrêter là et se taire, en attendant que les voiles gonflent et que le bateau reparte. Même si c'est en sens inverse.

dimanche 20 septembre 2015

Golem duplicata

Voici un texte un peu difficile
écrit il y a bien longtemps...
quand son identité vacille
on s'exprime en grisant
les marges du codicille
 que l'on croit rétractile




Rédige ton testament il te reste un printemps
dans l’âtre brûlent tes dernières journées

                                   et tu percoles ta mort
en humble roturier tu meurs

regarde-toi en face, dans la glace qui fond
                                                     tu es comme un coupable avant la décapitation

ton sang se coagule dans tes yeux injectés

                                     et tu arbores une mine défaite comme un vieux manteau

tu trembles sans bouger tu conduis comme un fou
alors qu’à deux pas les gens rient et sont saouls


Source tarie et son bassin (on appelait ça une pile dans notre jargon familial)

                     si seulement ton or pouvait servir à te racheter
                l’âme aurait un second souffle tu serais ranimé

mais las ! les marins ont perdu pied et l’arme passe à gauche
                      tes espoirs envolés                  font des froufrous des libertés           statues

et toi tu t’enfonces dans la glu de demain, dans l’arbre déconnecté

je pense à toi qui pleures et moi aussi je pleure
                       tu pleures de peur                                           j’ai peur de pleurer

         tu frissonnes comme un sergent-major dégradé
                                           un prêtre défroqué face à la mort qui l’appelle

et moi je range mes souvenirs dans la malle au grenier

je pense à toi malingre je me tais

si tu voulais tu pourrais griller toutes tes journées               mais tu attends l’impassibilité
                          et tu rages de vouloir tout casser et de ne pas pouvoir

je me garde un recoin pour rêver, une cachette d’espion, un nid d’aigle
                                                     et tu me rejoins là soudain
             avant que s’abatte le couperet
Reflet sur la ville ou la ville n'est-elle qu'un reflet ? A-t-elle son double dans les replis secrets de notre cerveau ?
                                                              que la veuve noire te plaise
                 et que j’aille l’embrasser
                       pour une exécution pour les basses marées                            des œuvres basses

                        je galope vers la vie tu m’entraînes vers l’ennui

                   je trace tu me rattrapes et me happes comme un vulgaire moustique

                                     je suis le puceron d’une pucelle enfermée
        (je brûlerai avec elle)

comme un brasier                      tes yeux semblent briller d’une haine forte et dense
et je sens soudain                          que tu saisis mes mains

                        me voici ! laissez donc partir l’autre

                                         mes hommes ont combattu pour tu sois livré
                   si tu recommençais le parjure de la vie
                                         tu ferais même chemin jusqu’à cette infamie infâme

               tu loverais ton sourire dans cette victoire de lâche

              surprise au bout d’un fil

                                                     (le pendu est détruit - quel est ce jeu stupide)
et je suis sans moi-même

                                                            devenu aussi gris qu’un marbre de tombeau

qu’un granit du Morvan posé sur ta dépouille

                     ci-gisent bien enlacés
                                                 moi et mon double
profané




samedi 21 avril 2007

jeudi 17 septembre 2015

Démission





Un pas vide
                           des ortho lents
                                                 quels sont les pris 
                                                                                                                        de nos braves paris

je reste las                                                                  tel un renard
                    dans sa tanière


                                                forte de ses petits
    l’arme est toujours fatale
                                                                                       le regard gris
                              et les soupçons fondés

Un pot vide
                                          des armistices
                                                   quoi de plus honnête
                                                                                   que l’argyronète

                                               je plante les mâchoires
                   de mon étau
                                                     et je rabote
     j’ai larme facile
                                          mon soupir de prisonnier
             et les soupers à la grimace

Un mot vide
                                   des abris bus
                                                         quelle est la joie
                                   de mes intrus
                                                                         vous qui restez
                                             ne demeurez jamais factices
                                                               comme des bouteilles d’exposition

dans la grand'cave 
                         

de l'oubli

Un mot ride
                                                       et son prix...






mercredi 16 septembre 2015

Ce retard coutumier





Ah ! Douleur incessante au regret amer
Comme des pépites de chocolat pur et sans miellat

Le supplice du goutte à goutte, de date à date
Comme des pavanes insolites dans un ballet nuptial
Ces sertissures de paroles
De mauvais engagements qui cerclent le printemps

Je me charge de moi comme d’un ânon bâté
Comme d’un rire pour de faux
Comme d’une tignasse à recoiffer

Et tous les gens autour qui crient leur désamour
Qui criaillent et qui piaillent dans leur basse-cour
Nous laisseront-ils rêver un dernier temps d’aimer

Toi, toi entière comme un sourcil dressé
Une écoute si précieuse pour mon cœur esseulé

Ce délicieux indispensable et impensé
Retard coutumier




mardi 15 septembre 2015

La danse sur le bord du monde



J’ai dansé sur le meuble effort de tes jours
ma stupeur de ne pas te connaître avant la fin du monde
c’est un abécédaire de l’inconnu qui serpente entre nous
comme une chanson mutique et un rythme sans ordre le bord du monde
penser c’est d’une fatigue sans nom
il faut ramener le désespoir à de justes propensions et le fin du fin c’est la fin d’une onde

je me partage entre deux boulevards au Monopoly des starisations
et du hasard des provocations
si tu veux nous irons nous chauffer sur le radiateur à silence
et alors nous prendrons une bonne tranche de vie dopés à l’infini de la chaleur blonde
et à la fin du monde nous irons en chantant vers l’échafaudage de nos vingt ans
© MMM
J’ai pleuré sur le mol essor de nos biais
si tu veux nous opterons pour la craie bleue
nous écrirons sur la carte blanche
nos peurs rouges et le danger sur tout ce qui brille
le discobole de nos quadriges
de nos imbus

je panse les chevaux de tes reins un rien retourné et c’est un rein
corrompu par l’ablation sublime de tes mains au fond de nos regards un hymne à la foi comme un pommier dans l’azur
comme une fleur dans un désert et le pourquoi pas de nos rires
cédille inconsciente de nos désirs

ô syllabique majeure de nos doigtés mellifères
nous dormons au cœur de nos affaires

comme des répliques sans passiflore
et des chemins sans bas-côté
comme le sillon d’un bateau enivré de lumière phosphorescente



dimanche 7 octobre 2007