jeudi 28 septembre 2017

Père, pourquoi... (suite)






Mais la maison ne fut jamais noire et silencieuse, elle se remplit de ces flèches dont le Psaume décrit l'intérêt pour le "carquois" d'un homme de tous les temps. 

La maison, ta maison, ton oeuvre, la réussite (partielle) de ta vie, l'aboutissement de ton travail et l'extrême point focal de ta route.

Père, tu étais un raconteur d'histoires, un raconteur de ton histoire, tu y mettais un point d'honneur, enrobant tes palabres de digressions qui me paraissaient le plus souvent inintéressantes, mais que tu savais émettre dans ton style inimitable, ta verve hachée, tes cheminements dispersés, souvent des impasses que tu ne contournais jamais, et dont tu sortais en escaladant le mur du fond.
© M. MM

Histoires de la guerre, de la grandeur minime d'un fils de fermier breton qui s'essaie - et parvient de temps en temps - à retirer son épingle du jeu, à défaut de réellement tirer les marrons chauds du feu.

Des histoires sans fin, à vous abrutir l'âme, des histoires vraies mais tellement rapiécées, tellement en manteau d'Arlequin, qu'il ne m'était permis ni d'en voir le bout ni de les retenir dans leur entièreté, dans leur déroulement, souvent en dehors de toute chronologie fiable, hors de tout ancrage apparent dans le prosaïsme de la réalité.

Quand un griot meurt en Afrique, c'est une bibliothèque qui disparaît.

Quand tu es décédé, c'est un pan de mur de bibliothèque qui s'est écroulé, avec ses livres adossés dans un ordre secret contre, tout contre, les balèvres en saillie de ta mémoire torturée.

(à suivre)