"Pendant plus de vingt ans d'une histoire démentielle, perdu sans secours, comme tous les hommes de mon âge, dans les convulsions du temps, j'ai été soutenu ainsi par le sentiment obscur qu'écrire était aujourd'hui un honneur, parce que cet acte obligeait, et obligeait à ne pas écrire seulement. Il m'obligeait particulièrement à porter, tel que j'étais et selon mes forces, avec tous ceux qui vivaient la même histoire, le malheur et l'espérance que nous partagions." A. CAMUS, Discours de Suède, 10 décembre 1957. (Ed. Gallimard)
Ces propos du Camisard de la philosophie de l'absurde, semblent s'appliquer de manière particulière à ma propre histoire.
Et dans le rendez-vous bihebdomadaire avec vous, lecteur, qui prend peu à peu une place sacrée, au moins dans ma vie, il y a cette idée importante je crois de partage d'une pensée encore influencée (encore encore !!) par l'idéologie ambiante.
S'arracher à son contexte - et à son co-texte - est un effort quasi surhumain pour moi, tenter de se porter vers des hauteurs sublimes par le seul jeu des signifiants ne semble même pas m'être permis.
Je ne suis pas un Mallarmé, je suis le maigre traducteur de mes propres infinitésimaux, comme victime de la subjectivité envahissante et dirons-nous, coronaire sans thrombose apparente.
(...)
Le temps, demandez-moi ce que c'est, sinon une portion d'âme, un animal caché par une froide journée d'hiver, au creux blotti de nos replis intimes.
© MMM |
Dans la constellation des items catalogués, le temps est une virgule, un appendice nasal qui nous permet de respirer dans la pause transitoire et le tourment de fonds, et de sentir la vie sourdre en soi et hors soi, dans la pause et la tmèse de la phrase longue et sybilline de notre vie et aussi dans le tourment des événements pressés ou empressés qui trament notre état d'existants.
Le Temps retrouvé, un livre qui toujours dès la première occurrence de son titre dans ma prime jeunesse, m'a toujours paru être un majestueux et déjà célèbre bas-relief, le soubassement d'un Temple grandiose, un hymne à l'anti-mort, une sorte de camouflet littéraire ou littéral à la non-existence.
Virgule, non-existence, mort, résurrection par le mot.
L'écriture comme ressource et bâti, l'écriture comme retouche et parti.