Le carnet de route, le log de mes vertes années est rarement indemne de la tuberculose du pauvre, et me semble parfois jonché de défaites, déconfitures, bévues et mécomptes.
Les pages striées de ce cahier où je note mes sautes d'humeur semblent là pour en témoigner, comme le vide se met à tourner et à emmener avec lui le reste des non-choses, des non-êtres évanescents, des fadaises frétillantes et des fredaines trop faciles.
Le vide, la nature l'adorerait-elle en se courbant devant lui - on parle de la courbure de l'espace-temps- , serait-il majesté ténébreuse qui aspire toute chose pour l'engloutir à tout jamais, ou le régurgiter à une adresse inconnue ?
Je ne le crois pas, mais...
Nous sommes poussière, nous brassons du vent et nous nous perdons en conjectures sans nombre, sans but, sans chemin. (...)
Peut-être que notre intimité nous mange de l'intérieur, nous empêche de voir le bas-ventre de la vie.
Celui qui grouille de monde, qui vibre de ces ondes porteuses capables de faire crouler les murs de Berlin, toutes les places fortes du monde, tous les périphériques et toutes les Capitales de la douleur.
Nous manifestons l'appartenance à des réseaux, quand notre firmament se laisse effilocher par la lumière de nos feux de croisement.
(...)
Nous sinuons, nos méandres se multiplient avant l'arrivée en eaux salées, c'est un peu ça l'épitomé de ce que nous apporte la médecine moderne.
Work in progress que notre vie, éternelle quête d'un absolu qui ne serait surtout pas le vide et encore moins le vide absolu.
Pas de nirvana symbolique pour nous autres les piétons d'un univers incommensurable, inimaginable, et nous nous consolons en attendant le monde de demain, qui vient à petits pas, doucement, ou parfois dans un boucan indescriptible, ou en fanfare, comme un défilé militaire...