« Le réel, c'est quand on se cogne. » Lacan
Donc je n’ai pas envie d’écrire.
Faute de croire en toi, Bret, faute de croire en moi.
Un hiver nous habite qui semble bien installé, et recouvre les aspérités fécondes de nos sentiments d’une épaisse couche de neige, d’un velouté qui nous isole, d’une volonté sublime et consensuelle de taire les événements rugueux de nos vies passées.
Faute de croire en toi, Bret, faute de croire en moi.
Un hiver nous habite qui semble bien installé, et recouvre les aspérités fécondes de nos sentiments d’une épaisse couche de neige, d’un velouté qui nous isole, d’une volonté sublime et consensuelle de taire les événements rugueux de nos vies passées.
C’est pas qu’on n’aime pas, mais comme dit la chanson, la vie sépare, la vie éloigne, la vie enivre, la vie entame le gâteau du partage, et elle se taille une part de félin.
Une sorte de pesanteur, une perte d’appétit et d’intérêt, une soif autre aussi s’immisce doucettement - gentiment diraient les Suisses romands - au fond de nous et nous fait repousser sans geste de dédain et sans dégoût la part qu’on aurait dû aimer dans notre relation, réciproquement idem, et donc : pas de réponse à une supplique restée imprononcée, peut-être parce qu'impronçable.
B.A. du film avec Romy Schneider |
Que dis-je, nous sommes grandis et rapetissés à la fois, grandis par cette distance et par l’effet loupe qu’elle induit, et en même temps amoindris par la promiscuité et l’exiguïté de nos sentiments, rabougris et élancés nous sommes dans l'entre-deux de la vérité du sentiment et du mensonge de la parole, car la parole ne peut tout dire, ne peut épuiser notre réel, ne peut signifier ni même singer convenablement et suffisamment la richesse infinie des affects et de leurs vecteurs sentimentaux.
Car je crois que nous n'avons pas que des sentiments euphoriques/dysphoriques, selon la distinction classique, mais des millions, des milliards de sentiments tous différents, comme des teintes et des nuances extrêmement variées, selon le moment, la personne que nous rencontrons, l'histoire de cette relation et l'anamnèse de notre histoire personnelle.
Comme le nez peut percevoir des trillions de trillions d'odeurs divergentes selon les recherches les plus récentes, de même nous possédons en nous des milliasses de milliasses de sentiments divers, variés, composés, patchworks, manteaux d'Arlequin, compositions florales de la vie intérieure... que sais-je encore ?