dimanche 26 février 2017

L'abscisse et l'ordonnée





Dans les gués de Monsieur Jourdain
Réserve de Sigean © A. Maury

J'ai trouvé un gredin
Voyez-vous, un gredin
J'ai aussi trouvé son gourdin
Voyez vous, son gourdin

Et face à l'absence de crédence
Je restais en errance
Comme une pierre de patience
Entre tes mains
Pauvre de tain

Dans les arbres où montent les chèvres
Au Maroc au fond du terrier d'un lièvre
J'ai passé des moments de fièvre
Pétulants de présence
Et de danses

Comme si tu venais demain...




mercredi 22 février 2017

Hubo un pronunciamiento que me dio mucho trabajo...





Recale-citron dans l'aube des antiennes

Un enfant tombé
Pièce de Musée aux rythmes pétrifiés
au fond d'une fosse


Me fait redoubler de personne-alitée
Et dans l'enfer des molles d'avis bâclés

Donne un travail dont l'orbe n'est pas ancienne...
Gardez-vous de juger au rythme des écosses

Pénétrez-vous bien de la valeur d'une vie
De peur d'être aussi recalés de la nuit

Et de finir au geindre de la morgue...




dimanche 19 février 2017

La nouvelle Héloïse ?





Quartier libre d'une vieille lune, à laquelle je me suis honnêtement habitué, comme si dans l'espace étonné de ton regard je pouvais entrevoir d'infinis paysages, ou plutôt une infinité de paysages, de montagnes, de villes-fantômes, de prodromes d'un paradis retrouvé. 

Une ouverture vers les grands espaces peut-être, une vraie et sobre reconnaissance de mes différences. 

Rien au fond n'a changé entre nous, sinon que je me découvre plus libre et gorgé de cette enivrante défaite, de cette débandade joyeuse et un peu surfaite, de ce noir lumineux de certains morceaux de charbon cassé. 

Mon hymne est là, dans ma gorge, prêt à se départir de son étrave retenue, et à se déployer comme l'étendard claquant sous l'effet défripant d'un souffle puissant.

Repassé par le vent, détendu et heureux, je sèche là, au soleil de ta rue, comme déshabité de mes habitudes, comme défait de mes invraisemblables (in)certitudes. 

J'attends et pourtant tu es déjà là, confiante et vraie, pulpe de fruit et d'agrume, mêlée de joie, de délassante réassurance, de 'célestitude' et aussi, comme en surplus, d'ornements propices.

Ma pauvre Héloïse, mon crucifix verbal, mon attirante vénusté, je bois à l'aube de tes regards comme à celle de soleils multiples, sans cesse renouvelés, sans cesse ressuscités. 

Je sais que tu m'attends, au rivage de mes mains, comme une enfant perdue, comme une poitrine gorgée de lait et de ces riches suavités qui valent la vie, comme le palindrome d'un drame (ou d'une drachme retrouvée).



Tu es la ride sur une eau dormante, d'où pointe le fer de lance de cet œil étonné qui rime à l'infini.

Tu es l'étable où mon hier et mon hiver ensemble se sont finis.



mercredi 15 février 2017

Arrivez sans décombres...





Dans l'art de la moliéresque tenure
Un orme pleure sur sa déconfiture
Fait semblant de croire en toi le ferme amant
Quand tu l'attends enfin au firmament

Il sculpture les baies bémols 
Et transfère les banques Schmoll
Comme si demain apportait
Un seul souvenir épais et figé

Et les surlendemains habillés de saumure
Ou de déconvenues aux arbres de l'épure
Par-delà les nuées en un rythme chagrin
Je perdure un instant dans les bras du matin

Je perdure un instant dans les bras de l'azur
Habité de destin et consolé sans mesure
Car la farce tranquille qui me fait de grands signes
Dans l'armoire est rangée où on taille la vigne

Avec un outil vrai sorti comme une furie
Et le trait en dessin de la verte envie



Et celui du génie des elfes déportés
Vers un courageux fief aussi blond que les blés

De la raison



Photo © Aline Maury


vendredi 3 février 2017

Le lion et le cachalot



Le seul fait d'exister est un véritable bonheur
Blaise Cendrars


Être profondément soi, est-ce renier le moi boursouflé et bouffi qui gisait en travers de ma voix, grand cadavre inversé de toutes mes projections, de mes retours au bercail, de mes lâchetés déguisées en prudence. 

Il pleut sur la ville 
et la mort travaille, 
tranquille, 
sans bruit aucun, 
dans les profondeurs et les ressacs des êtres, 
animée d’une perpétuelle indentation, 
furieusement tranquille, 
comme harponnant le cachalot du monde vivace et laissant là une trace de sang, 

là-bas du spermaceti, 
qu’elle ose recueillir en geignant, 
comme une petite vieille ratatinée attise son feu avec le tisonnier court, 
arme de poing plus que grand estoc dans un combat, une lutte, 
un corps à corps âpre et plein de sa finitude bariolée de misère. 

Car la misère est la richesse du néant.

Elle est le lion assis qui contemple les usagers du Musée des vivants.




mercredi 1 février 2017

Le vieux mendiant et son habit



"Longtemps, longtemps, longtemps
après que les poètes ont disparu
Leurs chansons courent encore dans les rues.
Un jour peut-être, bien malgré moi,
Un jour on chantera cet air
Pour bercer un chagrin,
Ou quelque heureux destin.
Fera-t-il vivre un vieux mendiant
Ou dormir un enfant ?"
L'Âme des Poètes, chanson de C. Trenet, 1951

Une fondrière, c'est ce que ta vie est devenue. 

Il te faudrait rebâtir sur les pentes de cette énorme ornière, où tu gis, dans ton sang, qui coagule lentement. 

Tes routes sont sinueuses, et peu de gens y passent, tu as donc peu de chance d'être secouru, entouré, aidé. 

Tu hurles et personne ne prête attention à tes rugissements.

Tu hèles alentour, et personne ne répond à ton interpellation. 

Alors tu te contentes de geindre, une prière inassouvie, in-amortie, sort de ton âme fusillée de violences symboliques, comme une plainte et comme une vaine doléance.

Tu es le printemps silencieux de la présence-absence, de la vie/non-vie, de la fin non finie.

Embastillé dans la misère, comme un prisonnier dans un camp arraché à son humanité et marqué dans ses rides du sillon lugubre et froid de la nuit.

...