vendredi 29 mai 2015

Petit retour sur un questionnement...
La mort de Jézabel, Gustave Doré

9 octobre 2008
La crise pour l’instant paraît toute virtuelle, on n’en sent pas encore toutes les homériques conséquences, les rythmes brisés, les destructions d’emplois, les vies à bandons des paumés, le cortège funèbre et fuligineux des années perdues, les navires en perdition eux aussi souvent, la simple et terrible traînée de bave que cela va engendrer immanquablement. Monstres, chimères, Érinyes, centaures aux ailes coupées, licorne à la corne brisée, sentiers ravagés, pas d’issue ni d’illusion, sinon la misère la plus noire, la plus terrible. L’exiguïté due à la promiscuité, à la proximité létale de tous les autres. Toutes ces bouches qui ont faim, toutes ces gorges qui ont soif, qui voudraient vivre et ne le peuvent (ne le pourront) déjà plus.
Car elles vont venir les conséquences. Elles seront peut-être surprenantes pour moi, en premier, car je continue à faire comme si la crise n’était pas là ! Comme si c’était une vaste blague, de l’irréel, un tigre aux dents de papier...


C'était en 2008, l'été finissait de frimer en beauté, et maintenant ? Que va-t-il se passer ? Comment voyez-vous l'avenir ? Quelles sont les tendances et les profilés ? Les errances et les retrouvailles ? Les économistes, dit-on, peuvent tout prédire, sauf l'avenir... alors place au poète que vous êtes !!! Si vous le désirez, exprimez-vous librement sur ce que vous entrevoyez, ou entrevoyiez à l'époque...

mardi 26 mai 2015

L'enfant et le dévaloir...

L'objet encombrant


Maman m'a mis dans le vide-ordures
Le grand couloir si vertical
Le dévaloir...
Comme d'autres vont au caniveau
Au dépotoir
Ou au congél'

J'ai l'impression qu'j'suis de trop
J'ai étreint le sein sans pétale
Et voilà donc ma sépulture ?

Non ! Dans mon Enfer j'ai eu du pot
Le choc a été amorti - pour sûr
Il y avait au-dessus des poubelles
Merveille
un gratin de choux de Bruxelles
Où suis-je donc né ?

J'suis le ramasse-miettes du désespoir
Surnuméraire
De cinéraire


(J'suis comme dans un tour d'abandon
C'qui vaudrait mieux que ce cloaque
Ein Tag für die Babyklappen
Culla per la vita :
La vita è bella...
Baby hatch
(Hatchoum !)
こうのとりのゆりかご 
Kō no tori no yuri kago 
Berceau de la cigogne



赤ちゃんポスト
Akachan posuto
Boîte à bébé
(ou boîte à grands...)
Schweizes Babyfenster...
Fenêtre sur cour (!)
Si era español
On m'appellerait Esposito,
l'exposé, 
...déjà sevré ?...)

Je pleure comme il grêle
Et les éboueurs
Me déterrent

Ma mère j'peux pas lui en vouloir
D'avoir choisi un exutoire
Et pis j'veux pas qu'on l'accuse
Pasque j'aime bien les toboggans
C'est mon excuse rédhibitoire

Et son visage... lumière diffuse...
C'est comme un trou dans ma mémoire...
De survivant




vendredi 22 mai 2015

L'hère et la chanson



Notre société masque les souffrances et la mort,
les déchets et les miasmes, les souillures et l'immonde


SDF au féminin, ombre de la rue, habillée de sacs poubelle


Hurlez chiens de morgue et de sinistre augure
Hélez la souveraine des murailles de Saumur
Faites retentir sur les toits sombres
La grande nouvelle venue des ombres

Lazare est mort enseveli
Le dépotoir est bien rempli

Il est parti entrailles viscères
Dans le creux de la terre-mère

Ce soir
Lazare
N'est plus

Il n'a plus à chercher
Les pourboires de la rue
Les déboires de la mouise
Les squats abandonnés
Les poubelles alléchantes 
Du boulevard des Atlantes

Hurlez chiens de cariatides
Qui léchiez l'ulcère putride

Hélez la reine des murailles de Saumur
Faites savoir dans les chaumières étoilées
La nouvelle née de sinistres augures

Notre belle société peut s'en emparer
Et le canoniser :
Il a fini par crever
L'Impur





lundi 18 mai 2015

Ce faux poème est-il de moi ?
Le vrai self s'exprime-t-il là ?


Je ne suis plus un poète
Seulement un assassin
J’ai tué en moi l’être
Qui vivait sans venin

J’ai parlé au mort ce tueur
J’écris mon propre malheur
Tel un trésor que j’enfouis
Au fond de mon cœur contrit

J’écris l’infini avec la douleur
J’écris l’infamie et son impudence
Je rime de toi les dernières croyances
Comme un sombre et mauvais parleur

Oh ! ce rythme effréné des secondes
Qui bouscule le blé vert de mon monde
Et renfloue les cimes étrangères
Dans un recueil de hauteurs altières
Comme cette statue "ausculptée" de nuit à Lisbonne, et qu'une étoile éclaire, mes mots 
sont devenus des êtres austères et discrets qui éclairent -faiblement-
le sens suranné de la vie...  dans la grand'nuit de l'oubli

Las ! la ronde est folle et perverse
Je tente en vain de quitter l’averse

Sous la pluie battante de mes peurs
Mon âme est détrempée comme un pull-over

(...)

Je ne suis pas un poète
Mon art est une imposture bête
Et rien ne sert de croire en ça
Seulement la force de la joie

Ma joie elle est neuve et entière
Elle répond présente et parfois
Elle me tend une longue rapière
Pour batailler avec l'aloi

(...)

(J’ai trucidé ma poésie
A force de sanglots sémantiques
Ses jours de toute manière
Étaient comptés
Pour de bon
Mes mots ? des dents cariées
Qu’on ne saurait couronner
Il faut don' les arracher
A mon péricarde nostalgique
Et ne plus me mettre à la question
Une pitrerie de plus - ou moins...
Dans les soupentes de la raison
Qu'est-ce que ça change aux lendemains)

Tous mes objets transitionnels
Vont quitter le navire à la nage
Je suis un bien singulier pluriel
De la quatre-vingt-dix-neuvième page...